Né en Arménie, Artavazd Pelechian a créé l’essentiel de son œuvre à Moscou entre 1964 et 1993. Pendant près de trente années, au cœur du système soviétique, il réalise neuf films à la facture unique, constitués d’images documentaires. Archives ou prises de vues réelles tournées par le cinéaste, ces images sont retravaillées et montées ensemble, selon une technique qu’il nomme le montage à distance, pour aboutir à de véritables poèmes visuels qui échappent à la distinction classique entre fiction et documentaire. Son écriture associe subtilement, et en leur accordant la même importance, l’image et la bande sonore. Cinéma de l’émotion, sans dialogue, sans acteur et sans histoire, son œuvre pose un regard tranchant, et néanmoins plein d’empathie, sur la condition humaine.
Je suis persuadé que le cinéma peut véhiculer certaines choses qu'aucune langue au monde ne peut traduire. Pour moi, il date de la tour de Babel, d’avant la division en différents langages.Artavazd Pelechian
Alors que l’on a longtemps cru sa filmographie achevée avec la réalisation du film La Vie en 1993, Artavazd Pelechian présente aujourd’hui son nouveau film, sobrement intitulé La Nature, à travers lequel il observe une nouvelle fois la précaire cohabitation des communautés humaines avec leur environnement, un thème central dans son œuvre. Pour la plupart glanées sur Internet et réalisées avec des moyens amateurs, les images qui constituent ce film sont des témoignages fragiles tournés au cœur de la nature et de ses secousses. Véritable élégie visuelle, le film dresse le constat sans appel de la supériorité de la nature, capable de dompter toute ambition humaine.
Galerie d’images
Parallèlement à la projection de ce film-événement, la Fondation Cartier propose la redécouverte de deux joyaux de la filmographie du cinéaste. Les Saisons met en scène une communauté de paysans arméniens et témoigne du lien symbiotique qui les unit à l’environnement naturel au sein duquel ils vivent et travaillent. L’approche musicale du montage cinématographique d’Artavazd Pelechian atteint avec ce film des sommets d’intensité. Avec La Terre des hommes, film précurseur, le cinéaste observe, à la manière du Penseur de Rodin dont l’image ouvre et clôt le film, la soif de progrès technologique qui anime les hommes, et dont témoignent, au cœur des années soixante, une grande capitale comme Moscou et ses réalisations techniques et architecturales. Cette célébration des promesses du progrès annonce pourtant la suite de la filmographie du cinéaste qui développera une vision plus pessimiste de cette course technologique. Ainsi réunies, ces trois œuvres essentielles engagent, d’un bout à l’autre de la filmographie du cinéaste, un dialogue qui résonne profondément avec les enjeux du présent.
Commissaires : Hervé Chandès et Thomas Delamarre, assistés de Sidney Gérard
Rétrospective Artavazd Pelechian à la Cinémathèque française
Reportée à une date ultérieure
Partenaires du film « La Nature » :
Avec la participation du ZKM Center for Art and Media Karlsruhe
Avec le soutien de la Folk Arts Hub Foundation