Olivier Saillard

« Dans sa dernière performance, présentée à Milan, Olivier Saillard a invité dix modèles des années 80 et 90 à s’approprier les vêtements des visiteurs. Une méditation à rebours de la course effrénée aux tendances. »
Moda Povera VI : les vêtements des autres - Milan (création)
Libération - Marie Ottavi

Triennale Milano et la Fondation Cartier pour l’art contemporain donnent carte blanche à l’historien de la mode Olivier Saillard pour cette troisième Soirée Nomade organisée au sein de l’institution italienne. Pendant deux jours, Olivier Saillard présentera trois performances, notamment une création in situ, Moda Povera VI : les vêtements des autres – Milan. Une performance participative sur la dimension intime du vêtement.

Après Boris Charmatz en 2021 avec 20 danseurs pour le xx^e siècle et plus encore puis Alexis Paul et Alessandro Sciarroni ainsi que dix chœurs traditionnels en 2022 avec Voci dal Mondo Reale, c’est au tour de l’ancien directeur du Musée de la Mode – Palais Galliera à Paris, actuellement à la tête de la Fondation Azzedine Alaïa et directeur artistique de la marque J.M. Weston, d’imaginer une Soirée Nomade dans les espaces de Triennale Milano.

Cette Soirée Nomade est la troisième dans le cadre du partenariat culturel de Triennale Milano et de la Fondation Cartier commencé en 2020. Elle est programmée à l’occasion de l’exposition Ron Mueck à Triennale Milano (jusqu’au 10 mars 2024).

Une Soirée Nomade en deux temps

Le vendredi 2 février, Olivier Saillard crée la première mondiale de Moda Povera VI : les vêtements des autres – Milan, nouveau volet de son travail inspiré par l’Arte Povera, mouvement d’avant-garde des années 1960 qui privilégie l’usage de matériaux simples, souvent naturels ou de récupération.

Imaginée et conçue spécialement pour Triennale Milano dans le cadre des Soirées Nomades, Moda Povera VI : les vêtements des autres est une performance et déambulation inédite selon un protocole aussi simple que fragile. Chacun des visiteurs est invité à prêter le temps d’un instant un vêtement qu’il chérit. Une chemise qui lui est chère, un blouson de l’être aimé, une robe, un pantalon mémoire d’un parent, un manteau d’une amie précieuse en son cœur : il s’agit de confier un vêtement choisi pour le souvenir et l’affection qu’il incarne aux yeux du prêteur. Dix mannequins choisies pour la dimension patrimoniale de la mode vivante qu’elles incarnent ont pour mission de porter ces vêtements reliques de l’ordinaire ou de l’exception du passé. Emporter plutôt que porter, présenter plutôt qu’enfiler, animer plutôt que vêtir. Ici réside l’enjeu de la performance : restituer à tout un chacun une partie intime qui le lie au vêtement sans le proclamer pour autant. C’est aussi tout l’art des gestes et des mouvements que possèdent les dix modèles sollicités.

Vêtements d’usages ou de travail, du quotidien, abimés, du banal ou de l’ordinaire, vêtements de mode ou de cérémonie, vêtements d’exception, vêtements éteints, tous ces « vêtements des autres » sans distinction défilent après qu’Olivier Saillard et son studio ne les préemptent d’un geste.

Le lendemain, samedi 3 février, le public pourra découvrir ou redécouvrir deux œuvres importantes du répertoire d’Olivier Saillard :

Salon de Couture, premier défilé sans vêtements de l’histoire de la mode qui constitue la toute première création d’Olivier Saillard. Créée en 2006, jamais rejouée depuis, elle met en scène Violeta Sanchez, muse et modèle de Yves Saint Laurent et Helmut Newton, dans l’exercice d’un défilé fantôme. Si le protocole scénique de la haute couture est respecté – chaises de salons, podiums, bouquets de fleurs d’apparat – des vêtements en revanche il ne reste que les descriptions que Violeta, en directrice de salon ordonnée, prononce avec soin, comme il était d’usage dans les maisons de mode jusque dans les années 1950. Souvenirs des tissus, des formes et des matières, les vêtements, fondus comme neige au soleil, cousus de mémoire, défilent au son de sa voix.

Moda Povera V : les vêtements de Renée. Présentée pour la première fois au public en juin dernier à la Fondation Cartier à Paris, cette performance dernière en date dans le répertoire d’Olivier Saillard est présentée dans le Teatro de la Triennale. À travers la garde-robe ordinaire de sa mère disparue il y a deux ans, le créateur utilise les techniques de la haute couture pour découdre et transformer ses vêtements. Les chemises ordinaires se muent en robes d’exception par les connaissances de l’histoire de la mode et de ses savoir-faire. Ils conservent pour autant la vulnérabilité de celle qui les a fait vivre. La mannequin Axelle Doué, dans un exercice subtil et raffiné où se dévêtir devient une chorégraphie de l’intime, sert avec grâce cette garde-robe infiniment personnelle.

Cette nouvelle Soirée Nomade milanaise s’inscrit ainsi dans la continuité du travail créatif d’Olivier Saillard qui s’est à maintes reprises illustré par d’importantes expositions, installations et performances de mode – dont, récemment, au Palazzo Pitti à Florence – et poursuit ici son projet artistique et pédagogue « Moda Povera ».

« Aux fashion weeks qui se succèdent avec frénésie, j’ai souhaité proposer deux jours, quelques heures de performance où le vêtement et non pas la mode sera célébré, émancipé de tout caractère commercial et consumériste, affranchi de toute perspective économique. Les trois performances qui vont se succéder à Milan ne sont à apprécier que du point de vue poétique et performatif. »

Olivier Saillard

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Moda Povera VI : les vêtements des autres – Milan
Conception : Olivier Saillard
Avec : Christine Bergstrom, Kristina de Coninck, Axelle Doué, Charlotte Flossaut, Claudia Huidobro, Sonia Ichti, Ania Martchenko, Anne Rohart, Violeta Sanchez, Amalia Vairelli, Olivier Saillard, Gaël Mamine, Zoé Guédard, Romain Blot, Antonin Simon Giraudet
Collaboration artistique : Gaël Mamine
Assistants : Zoé Guédard, Romain Blot, Antonin Simon Giraudet
Accompagnement technique : Morgane Denis - La Mode en Images
Presse et communication : Nathalie Ours - PR Consulting
Studio manager : Aymar Crosnier
Chargée de production : Noémie Torz
Production : StudiOlivierSaillard
Coproduction : Fondation Cartier pour l’art contemporain - Soirées Nomades, StudiOlivierSaillard.
Ce projet a bénéficié d’un accueil en résidence à la Ménagerie de verre – Paris.

Moda Povera V : les vêtements de Renée
Conception : Olivier Saillard
Avec : Axelle Doué, Olivier Saillard, Zoé Guédard, Gaël Mamine
Studio manager : Aymar Crosnier
Production : StudiOlivierSaillard
Remerciements : Bénédicte Breton, Romain Blot, Morgane Denis, Jocelyne Imbert, Antoine Jean, Antonin Simon Giraudet, Nathalie Ours, Cécile Holstein et Grégory Teillet / Les Archives Nationales

Salon de Couture
Conception : Olivier Saillard
Avec Violeta Sanchez, Olivier Saillard
Collaboration artistique : Gaël Mamine
Studio manager : Aymar Crosnier
Production : StudiOlivierSaillard

Biographie

Olivier Saillard est diplômé en histoire de l’art, ancien directeur du Palais Galliera –Musée de la Mode de la Ville de Paris, actuellement directeur de la Fondation Alaïa et directeur artistique, image et culture de la marque J.M. Weston. Depuis, il mène en parallèle de son travail d’historien une réflexion poétique présentée sous forme de performances dont les plus notoires, Impossible Wardrobe avec Tilda Swinton, ont inauguré un cycle de travail de dix années de collaboration. De même, Models never talk avec un studio de mannequins célèbres, a institué une nouvelle forme en réponse aux défilés de mode conventionnels.

En 2018, il fonde « Moda Povera », une entreprise de création vestimentaire poétique, performative et pédagogique qui repose sur la transformation de vêtements ordinaires et modestes, magnifiés par les savoirs et les techniques haute couture.