Avec des peintures, des vidéos, mais aussi des objets insolites, des décors, des machines fantasques et sensationnelles, Beat Takeshi Kitano conduit le visiteur de surprise en gag, de jeu en leçon de choses, se moquant de l’art contemporain, s’amusant avec l’histoire et les sciences et se jouant des clichés associés à son pays, le Japon.
Avec cette exposition, j’ai sans doute voulu donner une autre définition au mot « art », qui soit moins conventionnelle, moins snob, plus décontractée et accessible à tous.Beat Takeshi Kitano
L’invitation de la Fondation Cartier
Si cette personnalité toujours en mouvement trouve son inspiration en toutes choses, deux motifs semblent particulièrement marquer son œuvre : sa fascination teintée de nostalgie pour le monde de l’enfance et son rapport à l’image, fondamental pour sa démarche créative et qui s’illustre par une production prolifique de peintures, souvent présentées dans ses films. Réfractaire à l’idée d’institutionnaliser cette production artistique, qu’il considère avant tout comme une pratique personnelle, Beat Takeshi Kitano n’avait jusqu’à présent jamais répondu aux diverses sollicitations de musées à exposer son travail. S’il a accepté l’invitation de la Fondation Cartier, c’est suite à la rencontre avec son directeur, Hervé Chandès, et à leurs nombreux échanges au cours desquels est née l’idée d’une exposition s’adressant aux enfants, conçue à elle seule comme une gigantesque installation.
L’exposition
En créant Gosse de peintre, un projet kaléidoscopique dont la dimension autobiographique est évidente, Beat Takeshi Kitano prend à contre-pied les principes mêmes de l’exposition. Invitant les visiteurs à interagir et participer, il transforme le musée en parc d’attractions dans lequel il fait entrer tous les mondes de Beat Takeshi Kitano. La culture populaire et la réflexion scientifique, l’imaginaire, la satire, la tradition, la pédagogie, le beau et le kitsch s’y côtoient en un ensemble à la fois hétéroclite et complémentaire.
Attractions
Au fil d’un parcours semé d’étranges images, d’ateliers et de leçons de choses, de jeux et de gags, il entraîne le visiteur dans un univers aussi joyeux que riche et complexe. Son exposition permet de découvrir sa théorie sur la disparition des dinosaures, des exercices mathématiques, des métaphores scientifiques ou encore des documents et plans secrets de l’armée impériale japonaise. Des poissons transgéniques déjà garnis de délicieux sushi y croisent des chimères et animaux imaginaires tandis qu’un criminel récalcitrant échappe à la pendaison – clin d’œil grinçant au fait que la peine capitale existe encore au Japon. Véritable « usine à gaz », une gigantesque machine à coudre tourne à grand bruit pour confectionner un ruban dérisoire, se faisant ainsi la métaphore ironique de l’art contemporain. Le visiteur passe d’une attraction foraine à l’autre, du stand de gaufres au cabinet de curiosité sans oublier le théâtre de marionnettes, avant d’aller s’exercer à la peinture à travers des ateliers pour petits et grands.
Peintures
L’exposition Gosse de peintre présente aussi pour la première fois un large ensemble de peintures de Beat Takeshi Kitano. Prolifique dans sa production, Kitano se considère néanmoins comme un peintre du dimanche. Figuratifs, voire narratifs, ses tableaux récents – dont certains ont été produits pour l’exposition – semblent exploser de couleurs et ne sont pas sans rappeler l’art naïf. Durant sa convalescence suite à l’accident de moto qui faillit lui coûter la vie, Beat Takeshi Kitano a peint et réalisé notamment en 1996 une série de peintures troublantes représentant des créatures hybrides entre animaux et fleurs, qui sont présentées dans son film Hana-bi. Ces tableaux sont exposés avec un ensemble de vases qui s’inspirent de ces êtres étranges et ont été spécialement réalisés à Venise pour le projet.
L’image en mouvement
La vidéo et l’image en mouvement occupent une place particulière dans l’exposition. Des extraits de shows TV comiques, inédits en France, sont diffusés au milieu d’un décor mettant en scène Beat Takeshi dans ses déguisements les plus farfelus. En exclusivité pour la Fondation Cartier, Beat Takeshi Kitano a tourné trois petits sketchs comiques qui s’attaquent avec humour aux clichés que les Occidentaux portent sur le Japon et présentent différents modes d’expérimentations picturales menées à grande échelle, faisant écho à son dernier long métrage Achille et la tortue.